L’hypnose : une technique efficace pour soulager la douleur ?

L’hypnose agit directement sur le traitement neurophysiologique de la douleur. Utilisée en contexte clinique dès le début du XIXème siècle, et largement objectivée et mobilisée depuis, elle offre un fort niveau de contrôle les douleurs aiguës, chroniques et péri-opératoires, et peut aider les patients à faire face à différents types de douleur intense, aiguës ou chroniques ( brûlures, céphalées, fibromyalgie, cancers…). (Esdaile, 1846; Spiegel & Spiegel, 2008; Patterson, 2010).

 

L’hypnose réduit l’activation des aires cérébrales associées à la douleur aux niveaux sensoriels et affectifs, ainsi que les réponses du corps à la douleur. Elle combine différentes techniques, qui agissent sur plusieurs facteurs impliqués dans la nociception, notamment en modifiant les attentes et les représentations, en mobilisant l’attention focale, ou encore en générant de la relaxation physique.

Dans notre formation en hypnose médicale, nous combinons apports théoriques, exercices pratiques et étude de cas cliniques, pour apprendre à accompagner différentes situations :

 

  • Gestion de douleurs locales
  • Complément d’accompagnement de douleurs chroniques
  • Préparation aux interventions impliquant une douleur aiguë
  • Gestion de douleurs en contexte d’urgence

 

Face à ces situations, nous transmettons un modèle diagnostic ainsi que des techniques dédiées à aux différentes applications.

Une meilleure compréhension de l’action de l’hypnose médicale sur la douleur

Depuis la fin des années 1990, les neurosciences ont objectivé les effets de l’hypnose sur la perception de la douleur, tout en éclairant ce phénomène. La perception de la douleur y est abordée comme un phénomène à deux dimensions :

 

  • La dimension sensorielle, qui implique l’intensité du signal perçu.
  • La dimension affective, qui implique la composante émotionnelle et interprétative du signal.

 

Par différents procédés d’imagination et de suggestions, l’hypnose permet de modifier, de manière sélective et indépendante, le vécu sur ces deux dimensions (Rainville et al., 1999).

 

D’une part, elle peut altérer l’intensité du signal sans modifier la composante affective du signal. Il s’agirait ici, par exemple, de continuer à ressentir une douleur comme inconfortable, mais d’en baisser l’intensité perçue.

 

D’autre part, l’hypnose peut modifier la composante affective de la douleur. Il s’agirait ici, par exemple, d’y substituer l’affect d’inconfort par un affect plus indifférent, sans altérer l’intensité.

 

Enfin, l’hypnose peut cibler les deux dimensions de manière indépendante : baisser l’intensité d’une douleur tout en la rendant moins désagréable. Les corrélations neurophysiologiques à l’intervention hypnotique sur ces deux dimensions et sur leur découplage sont observables et reproductibles (Rainville, 2002; Landry et al., 2017).

 

Elles invitent à considérer les suggestions hypnotiques comme pouvant cibler des activités cérébrales localisées, et l’hypnose comme un moyen pour favoriser ces productions neuro-phénoménologiques.

 

Une méta-analyse récente de 85 études sur l’effet de l’hypnose pour soulager la douleur soutient l’efficacité de cette technique, des suggestions directes et ciblées, et l’implication d’un niveau bon d’hypnotisabilité (Thompson et al., 2019).

 

Sur ce dernier point, plusieurs études ont montré l’hypnotisabilité comme une aptitude entrainable (Spanos et al., 1986; Gfeller et al., 1987). Ce lien entre hypnotisabilité entrainable et implication de celle-ci pour agir sur la douleur plaide en faveur d’un entraînement à l’hypnose préalable pour optimiser plus encore l’efficacité des traitements analgésiques hypnotiques. La prise en compte de cette dimension est l’une des originalité du programme d’Hypnomedic, et permet de contourner une grande partie des résistances classiques rencontrées dans l’usage de l’hypnose médicale.

 

Construite sur une cette approche théorique solide et régulièrement mise à jour, la partie de notre programme de formation consacrée au travail sur la douleur repose sur deux bases pratiques :  l’hypnose ericksonienne, et une perspective phénoménologique issues des sciences cognitives.

 

  • Héritée des travaux de Milton Erickson, notre approche ericksonienne implique une adaptation aux spécificités du patient, notamment à ses propres capacités latentes de contrôle et de gestion de la douleur (Erickson, 1965; Patterson, 2010). Il ne s’agit plus de simplement comprendre le fonctionnement commun de la douleur, mais de s’intéresser également aux mécanismes individuels qui favorisent l’augmentation et la réduction de la perception de la douleur.
  • Notre approche cognitive-comportementale de l’hypnose nous permet de clarifier les cibles d’interventions pour réguler la nociception. Elle distingue en particulier le travail sur les attentes, sur les représentations, sur l’attention et sur les réponses physiologiques.

 

Pour donner quelques exemples pratiques : le travail sur les attentes permet d’associer des réactions affectives et cognitives positives à une intervention qui implique une douleur aiguë; le travail sur les représentations traduit les signaux nociceptifs en représentations imaginales, dont la modulation module en retour la douleur ; le travail sur le détournement attention sature le réseau de saillance, réduisant la perception de l’intensité de la douleur ; et le travail sur les réponses physiologique, en générant par exemple une relaxation musculaire profonde, favorise un apaisement dans la dimension affective de la douleur.

 

Combinées en fonction de la situation de douleur visée, ces différentes techniques forment un véritable langage hypnotique de la douleur et de sa régulation.

 

L’apprentissage progressif de ces différents éléments, en deux modules successifs, permet d’acquérir une méthode efficace et simple pour accompagner de nombreuses situations de douleur, dans leurs mécanismes communs et en fonction du contexte et du patient.

Bibliographie

Erickson, M. H. (1965). The Use of Symptoms as an Integral Part of Hypnotherapy. American Journal of Clinical Hypnosis, 8(1), 57‑65. https://doi.org/10.1080/00029157.1965.10402461

 

Esdaile, J. (1846). Mesmerism in India, and Its Practical Application in Surgery and Medicine. Longman, Brown, Green, and Longmans.

 

Gfeller, J. D., Lynn, S. J., & Pribble, W. E. (1987). Enhancing hypnotic susceptibility : Interpersonal and rapport factors. Journal of Personality and Social Psychology, 52, 586‑595. https://doi.org/10.1037/0022-3514.52.3.586

 

Landry, M., Lifshitz, M., & Raz, A. (2017). Brain correlates of hypnosis : A systematic review and meta-analytic exploration. Neuroscience & Biobehavioral Reviews, 81, 75‑98. https://doi.org/10.1016/j.neubiorev.2017.02.020

 

Patterson, D. R. (2010). Clinical hypnosis for pain control (p. x, 275). American Psychological Association. https://doi.org/10.1037/12128-000

 

Rainville, P. (2002). Brain mechanisms of pain affect and pain modulation. Current Opinion in Neurobiology, 12(2), 195‑204. https://doi.org/10.1016/S0959-4388(02)00313-6

 

Rainville, P., Carrier, B., Hofbauer, R. K., Bushnell, M. C., & Duncan, G. H. (1999). Dissociation of sensory and affective dimensions of pain using hypnotic modulation. Pain, 82(2), 159‑171. https://doi.org/10.1016/S0304-3959(99)00048-2

 

Spanos, N. P., Robertson, L. A., Menary, E. P., & Brett, P. J. (1986). Component analysis of cognitive skill training for the enhancement of hypnotic susceptibility. Journal of Abnormal Psychology, 95, 350‑357. https://doi.org/10.1037/0021-843X.95.4.350

 

Spiegel, H., & Spiegel, D. (2008). Trance and Treatment : Clinical Uses of Hypnosis. American Psychiatric Pub.

 

Thompson, T., Terhune, D. B., Oram, C., Sharangparni, J., Rouf, R., Solmi, M., Veronese, N., & Stubbs, B. (2019). The effectiveness of hypnosis for pain relief : A systematic review and meta-analysis of 85 controlled experimental trials. Neuroscience & Biobehavioral Reviews, 99, 298‑310. https://doi.org/10.1016/j.neubiorev.2019.02.013